mercredi 20 novembre 2013

Beurre de karité : une source d’opportunités pour les Africaines




Le commerce équitable procure des revenus décents à des millions de personnes.

Par Rebecca Moudio
Dans un hôtel de luxe de Manhattan, des femmes en robe traditionnelle africaine se dirigent vers une salle de conférence. Au milieu des complets gris et noirs, leur tenue offre un contraste saisissant. La foule est hétéroclite, mais unie autour d’un même thème : le beurre de karité, produit à partir d’une noix africaine et utilisé en cosmétique. 
C’est en mai 2013, en Amérique du Nord, que s’est tenue la toute première conférence de l’industrie du karité. À cette occasion, les producteurs africains ont pu rencontrer des géants de l’industrie cosmétique, comme L’Oréal ou BodyShop. Ces dernières années, la forte augmentation de la demande de beurre de karité les a amenés à réclamer une juste rémunération de leur labeur.
Ce beurre est extrait des noix du karité, un arbre poussant dans la région du Sahel. Il a depuis longtemps été surnommé « l’or des femmes », non seulement pour sa couleur dorée (bien qu’il puisse aussi être blanc dans certaines régions) mais surtout parce qu’il procure un emploi et des revenus à des millions d’Africaines. Souvent organisées en coopérative, les femmes récoltent les fruits du karité selon des méthodes traditionnelles. Elles broient ensuite les amandes qu’ils contiennent pour en extraire le précieux beurre, qui est vendu sur les marchés locaux ou internationaux. Ce beurre est comestible et peut donc être utilisé en cuisine, mais il sert principalement en cosmétique.
Selon le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), le beurre de karité fait travailler directement ou indirectement environ trois millions d’Africaines. Les principaux pays producteurs sont le Nigéria, le Mali, le Burkina Faso, le Ghana, la Côte d’Ivoire, le Bénin et le Togo. 

De bons revenus
Je gagne beaucoup d’argent pour ma famille en vendant du beurre de karité », a confié à Afrique Renouveau Lucette Ndogo, une vendeuse réputée sur le Marché central de Douala (Cameroun). Elle achète du beurre du Burkina Faso en gros pour le revendre à profit à des clients qui se fient à la qualité de ses produits.
Antoine Turpin de IOI Loders Croklaan, un producteur mondial d’huiles alimentaires, a déclaré au New York Times que le [beurre de] karité constitue une importante source de revenus pour des millions de femmes et leur famille en Afrique. Pour que ce secteur soit viable, il est essentiel d’assurer l’autonomie économique des femmes ». Le New York Times indique que la société de M. Turpin achète à elle seule près de 25 % des noix de karité cueillies par les femmes en Afrique de l’Ouest.
La demande croissante de produits bio et naturels en occident a fait du beurre de karité un produit très prisé. Connue pour ses vertus thérapeutiques naturelles, cette substance entre dans la composition de nombreux produits de beauté et de soins de la peau. Les consommateurs la préfèrent aux agents chimiques agressifs, aux colorants et excipients artificiels souvent utilisés dans les produits cosmétiques classiques.
Le beurre de karité est aussi utilisé dans les produits alimentaires. Les chocolatiers le substituent au beurre de cacao pour obtenir un point de fusion plus élevé et une texture plus onctueuse. Ce beurre sert aussi à la fabrication de fameuses barres chocolatées, comme les Kit Kat ou Milky Way.

L’or des femmes
Selon le New York Times, une étude menée au Burkina Faso en 2010 par l’USAID a révélé que pour 1 000 dollars de noix de karité vendues dans un village, les recettes, une fois injectées dans d’autres types d’activité économique, génèrent quelque 1 580 dollars supplémentaires. Le beurre de karité exporté de l’Afrique de l’Ouest rapporte entre 90 et 200 millions de dollars par an, ajoute le quotidien. La demande vient non seulement des grandes entreprises mais aussi de millions d’entrepreneurs qui espèrent faire fortune.
Cette forte demande soulève des questions éthiques, comme c’est souvent le cas des produits provenant des pays en développement. La récente popularité du karité s’accompagne d’une augmentation du nombre d’associations et de coopératives de commerce équitable réclamant un traitement juste des femmes africaines.
Produits à prix abordables
Le commerce équitable est un mouvement social, né dans les années 1980, qui vise à améliorer les conditions commerciales entre les producteurs des pays en développement et les acheteurs des pays développés. Ses partisans cherchent également à sensibiliser les consommateurs, estimant qu’un consommateur informé serait prêt à payer plus si le producteur est traité équitablement en retour. Pour que leurs produits soient achetés à un prix équitable, les producteurs doivent respecter les normes environnementales et conditions d’emploi recommandées par des organismes de certification, par exemple Fairtrade International, World Fair Trade Organization, Fair Trade USA et Fair Trade Federation.
Le modèle du commerce équitable semble constituer un progrès par rapport au commerce classique. Acheter les produits aux prix du marché assure un prix minimal aux producteurs. Les produits généralement associés au commerce équitable sont le café, le cacao, les bananes, les fleurs, l’or et d’autres produits exotiques. Il y a peu de temps encore, le beurre de karité ne faisait pas partie des produits africains les plus demandés.
D’après Harriet Lamb de la Fairtrade Foundation, « Le commerce équitable combat les injustices du commerce conventionnel, dont les producteurs les plus vulnérables ne parviennent souvent pas à couvrir les coûts de revient de leurs produits. C’est un peu comme un salaire minimum national pour le commerce mondial. Ce n’est pas parfait, ce n’est pas une formule magique mais c’est un pas dans la bonne direction. »
Commerce équitable ?
Philip Booth, du groupe de réflexion britannique Institute of Economic Affairs, voit les choses différemment. Il soutient qu’il « n’a pas été clairement démontré que les producteurs bénéficient de prix plus élevés dans le cadre du commerce équitable. Ce commerce peut être bénéfique dans certains cas, mais il ne mérite pas toujours sa réputation ».
Les détaillants en produits cosmétiques présentent souvent le beurre de karité du commerce équitable comme un produit éthique, authentique, traditionnel et exotique qui encourage la solidarité féminine. Ce beurre est produit par des Africaines pour être principalement consommé par des Européennes et des Nord-Américaines à la recherche de produits « équitables ». Un grand nombre de sociétés et petits entrepreneurs affirmant utiliser dans leurs produits du beurre de karité issu du commerce équitable, il peut s’avérer difficile de distinguer la stratégie commerciale du réel engagement.
L’Occitane en Provence, une multinationale française mondialement connue pour ses produits de beauté de luxe à base d’ingrédients naturels, est fière d’utiliser du beurre de karité issu du commerce équitable. En 2013, le PNUD a classé son modèle économique, pour ses activités au Burkina Faso, parmi les 12 modèles les plus innovants et inclusifs en Afrique.
Un espace d’échanges
Un rapport du PNUD, L’Occitane au Burkina Faso : Bien plus que du commerce avec les producteurs de beurre de karité, met en lumière l’engagement de la société, sa collaboration avec 15 000 productrices rurales et l’utilisation du beurre dans ses produits. Selon ce rapport, L’Occitane estime qu’elle paie 20 à 30 % plus cher le beurre de karité du Burkina Faso par rapport à celui des industriels occidentaux. Les ventes de beurre de karité à L’Occitane représentent des revenus d’environ 1,23 million de dollars par an pour les coopératives rurales et leurs 15 000 femmes membres.
Pour que le commerce équitable bénéficie à davantage d’Africaines travaillant dans le secteur du karité, l’Alliance mondiale du karité, une association qui œuvre pour la durabilité et la qualité du secteur a organisé la conférence de mai 2013 à New York. Son objectif était de favoriser l’échange d’idées le long de la chaîne logistique, entre les cueilleurs, producteurs, marchands, acheteurs industriels et consommateurs.
The Body Shop utilise le karité depuis plus de 19 ans et nous sommes pleinement résolu à construire un secteur du karité durable », a déclaré Mark Davis, directeur du service commerce équitable de la société. « Pour atteindre cet objectif, il est indispensable de faire partie de l’Alliance mondiale du karité.
D’autres produits mondiaux, comme le café, sont aujourd’hui associés au commerce équitable, et nombreux sont les acteurs du secteur du karité qui espèrent suivre cet exemple. Salima Makama, présidente de l’Alliance mondiale du karité, est persuadée que les Africaines qui sont venues à New York sont bien parties pour transformer les exportations de beurre de karité en or véritable .

Forte mobilisation au Cameroun pour secourir les PME en Afrique

Le 1er forum international de la finance s'est ouvert à Douala

Douala, la capitale économique du Cameroun abrite depuis ce jour, 20 novembre 2013, la toute première édition du forum internationale de la finance en Afrique subsaharienne (FIFAS), organisée dans le but de susciter une réflexion concertée, multipartiste et en profondeur sur les mécanismes de financements des PME en Afrique. 

Les travaux qui iront jusqu’au 22 novembre 2013 ont pour thème général : « Surliquidité bancaire, épargne et sous-financement du secteur privé : quels mécanismes et nouvelles techniques pour résoudre ce grand paradoxe de l’économie africaine ? » Ils ont été ouverts à l’hôtel SAWA par le Directeur général de l’économie et de la programmation des investissements publics, Dieudonné Bondomo YOKONO, représentant du ministère de l’économie, de la planification et de l’aménagement du territoire à cette cérémonie qui enregistre la présence  de  nombreux opérateurs et acteurs du secteur de la Finance issus de 15 pays d’Afrique et d’Europe. 

Dans son mot de bienvenu à ce forum, le Directeur exécutif de FinAfrique, Fabrice Kom Tchuente, initiateur de cette rencontre de trois jours, justifie la tenue de l’événement par le désir de sa structure de fédérer les énergies pour « trouver des solutions pertinentes, innovantes et efficaces afin de résoudre le paradoxe de la surliquidité bancaire et le sous-financement du secteur privé » en Afrique Subsaharienne.

 Fabrice Kom Tchuente

Plusieurs autres intervenants à cette cérémonie d’ouverture, dont Mathieu MANDENG membre du comité scientifique de FIFAS et Président de l’Association des professionnels des établissements de crédit du Cameroun (APECCAM); Protais AYANGMA AMANG, Président de la Fédération des sociétés d’assurances de droit national africaines (FANAF) et Aboudou Ouatara, représentant du Centre Africain d’Études Supérieures en Gestion (CESAG), ont déploré ce paradoxe, tout en soulignant l’engagement de leurs différentes organisations à adresser cette question qui reste d’actualité malgré les multiples fora organisés par le passé pour y faire face. 

Protais AYANGMA AMANG, autre membre du comité scientifique de FIFAS et par ailleurs Président Directeur Général de Colina La Citoyenne, un des principaux groupes camerounais de l’assurance, fait observer qu’avec une épargne de 1000 milliards de francs Cfa en 2013, les compagnies d’assurance de l’espace CIMA ( Conférence Interafricaine des marchés d’assurance) contribuent à aggraver cette surliquidité ; tandis que la rémunération de cette épargne est de plus en plus faible. D’où la nécessité de l’injecter dans l’économie à travers le financement des petites et moyennes entreprises, un marché actuellement couvert à seulement 20% par les banques d’après les chiffres fournis par FinAfrique, un cabinet implanté en Afrique Centrale et en Afrique de l’Ouest, spécialisé dans la Banque, la Finance et l’Assurance.

Une surliquidité de 763 milliards au Cameroun

Selon les statistiques de la Banque des Etats d’Afrique Centrale (BEAC), le gap entre les dépôts collectés par les banques commerciales, soit 2 877 milliards de francs CFA et les crédits à la clientèle, soit 2 155 milliards de francs CFA, s'élève à 763 milliards francs CFA à fin août 2013 au Cameroun.

Le représentant du gouvernement Camerounais à FIFAS 2013,  Dieudonné Bondomo YOKONO a affirmé la volonté de ce pays à canaliser le fléau de la surliquidité, à travers des actions telles que le partenariat noué depuis deux ans avec l’association camerounaise du leasing pour vulgariser le crédit bail ; des accords avec des banques commerciales au Cameroun pour financer le Programme thermique d’urgence, et le projet de financement de la mise à niveau des PME avec la facilitation des banques.

Les organisateurs FIFAS 2013 se fixent pour objectif, entre autres, de promouvoir et encourager le financement des petites et moyennes entreprises (PME) en Afrique Subsaharienne. Ledit forum s’articule autour d’un colloque scientifique (conférences, ateliers thématiques, tables-rondes), des rencontres d’affaires et d’échanges B to B (maillage, réseautage), des publications (actes du colloque, plaquette programme) et une Soirée de Gala.

Marie-Noëlle Guichi

mardi 5 novembre 2013

DE L'ÉLECTRICITÉ DANS L'AIR A EMANA-YAOUNDE



Le Cameroun sous « délestage » 12 ans après la privatisation

Tandis qu’à AES-SONEL, l’on se targue de faciliter l’accès des populations à l’électricité en branchant plus de 55 000 familles en moyenne chaque année contre 15 000 seulement avant la privatisation, les usagers, eux, expriment leur insatisfaction, et même parfois leur ras-le-bol.    



Le quartier Emana à Yaoundé, secteur dit « derrière la gendarmerie » est déjà à trois mois sans électricité. Les auditeurs de la Cameroon Radio and Télévision, CRTV, l’ont appris ce 05 novembre 2013 avec stupéfaction. Le journaliste de ce média de service public, qui déplore cette situation dans le cadre de l’émission « CRTV m’accompagne », rigole en disant que les populations de cette localité, sont dans les ténèbres. Ce, en plein cœur de la capitale politique du Cameroun et en plein 21ème siècle.  

Quelques jours plus tôt, c’est un autre journaliste, Parfait Siki, directeur de la rédaction de l’hebdomadaire « Repère », qui dénonçait ce délestage permanent sur son mur facebook ; indiquant au passage que les populations concernées s’apprêtent à manifester leur ras-le-bol sous peu de temps. Cette annonce n’a en rien ému les dirigeants d’AES-Sonel, restés de marbre à ce jour. On se souvient juste qu’en début d’année, un communiqué laconique tendait à préparer les esprits à ce qui se passe à Emana et certainement dans beaucoup d’autres endroits du pays aujourd’hui.





Jean David Bile, DG d'AES-SONEL

« La société AES-SONEL informe son aimable clientèle qu’elle se trouve dans l’obligation de procéder à la modulation de la demande afin de maintenir l’équilibre du système électrique»,  écrivait, dans un communiqué largement diffusé le 7 février 2013, Aes-Sonel, le groupe américain, concessionnaire du service public de l’électricité depuis 2001 au Cameroun. La raison avancée : « le service connaît en ce moment de fortes perturbations autant en journée que le soir aux heures de pointe », indiquait ledit communiqué qui intervenait après l’annonce, par le Réseau associatif des consommateurs de l’énergie (RACE), de l’ouverture d’un service de contentieux pour amener les usagers domestiques à engager des poursuites judiciaires contre cette compagnie en charge de l’énergie au Cameroun depuis la privatisation.
La réaction d’Aes-Sonel n’a pas empêché le Manidem, parti politique de l’opposition, de faire une sortie fracassante dès le lendemain. « L'incompétence d'Aes-Sonel, sa réticence à engager des investissements conséquents en matière d'équipement, son obstination à faire à tout prix des profits exorbitants, et surtout le laxisme du gouvernement kamerunais dans le contrôle de l'application du cahier de charges d'Aes-Sonel, sont les principales causes de nos malheurs », soulignait cette formation politique dans une déclaration publique, le  08 février 2013.
Elle y relevait les conséquences désastreuses de l’arrêt brusque de la fourniture d’électricité. Entre autres, la cessation des activités économiques, l’augmentation de l'insécurité dans les villes et campagnes, la perturbation de la scolarisation des jeunes, l’augmentation du nombre d’incendies dans les villes, les dégâts considérables dans la conservation des aliments, la détérioration des conditions de vie des populations... 


Une interruption chaque jour          
                                   
Rendu au mois novembre, la situation n’a pas beaucoup évolué. « Il faut que je me procure une lampe rechargeable pour que les enfants puissent étudier le soir. Ç’en est trop. Presque tous les jours maintenant, il y’a délestage. C’est même quoi avec AES-SONEL ? », S’énervait il y’a quelques jours, Henri Pokam, fonctionnaire à la retraite. Il exprimait son exaspération juste après une coupure intempestive intervenue dans la soirée, au quartier Simbock à Yaoundé. La veille déjà, presque à la même heure, il avait subi pareille interruption de l’énergie électrique et y a épuisé toutes ses bougies, avant le retour, des heures plus tard, de la capricieuse lumière d’Aes-Sonel.
 
Bougie, lampes tempêtes, ampoules rechargeables, les Camerounais ne s’en passent plus. La récurrence des coupures intempestives et interminables d’électricité, ces délestages, qui ont fait irruption dans leur vocabulaire depuis une dizaine d’année déjà de présence d’Aes-Sonel en terre camerounaise, les y obligent. 
Les chiffres du Rassemblement de la jeunesse camerounaise (RJC) sont effroyables. Plus de 1025 coupures d’électricité ont eu lieu sur l’ensemble du pays, pour la seule année 2011, selon cette association.  Dans une enquête menée auprès de 10 000 abonnés d’Aes-Sonel sur l’ensemble des dix régions du pays, et publiée en août 2012 par l’Agence de régulation du secteur de l’électricité, Arsel, en collaboration avec l’Institut national de la statistique, l’on apprend « qu’en moyenne, les abonnés enregistrent 6,8 interruptions par semaine, soit pratiquement une (01) interruption chaque jour ». 
Cette étude précise que « les régions du Littoral, du Nord-ouest, de l’Ouest, du Sud et du Sud-ouest sont particulièrement affectées par l’ampleur des interruptions, lesquelles sévissent davantage en milieu rural et périurbain ». Tous les abonnés sont concernés, que ce soit en basse ou moyenne tension. Au sujet de la qualité de la tension, l’enquête indique que « de milliers d’abonnés, soit 35% déclarent éprouver des difficultés à allumer leurs lampes à un moment donné de la journée ».


Prix grimpant, fourniture déficitaire

Les tarifs n’ont fait que grimper, malgré la mauvaise qualité du service, que déplorent les usagers dans leur grande majorité. Depuis le 1er juin 2012, avec l’accord du gouvernement, et malgré la contestation des mouvements des consommateurs, avec en tête la Ligue Camerounaise des Consommateurs, la société d’électricité a procédé à une hausse de 7% du prix du kilowatt pour les clients de basse tension et de 8,2% pour les clients non-domestiques. Un peu comme pour justifier ces coût élevés, le Directeur Général d’Aes-Sonel, Jean David Bilé a déclaré dans un message télévisé lors de la campagne marquant le 10 anniversaire de la  compagnie que : « aujourd’hui encore, près de 26% de l’électricité qui est délivrée sur le réseau électrique est volé. Cette énergie volée met  une charge importante sur l’entreprise, mais aussi sur ceux qui payent leurs factures d’électricité».  
Quant à l’offre, elle serait déficitaire. Des sources non officielles situent le déficit de l’énergie électrique au Cameroun à 3000MW. Mais selon des documents fournis par Aes-Sonel -qui a une capacité de production installée de 1015 MW dont 71% de la production provient de l’hydraulique-,  la demande se situe autour de 900 MW et l'offre à plus 1000 MW. La compagnie projette cette demande à 1000 MW d’ici 2016. Et, depuis la mise en service de la centrale à gaz de Kribi, avec ses 216 mégawatts de puissance additionnelle injectée dans le réseau dès fin mars 2013, la capacité de fourniture d’Aes-Sonel est relevée à près de 1 216 mégawatts.  Ce qui vent s’ajouter au 100 MW que livre le Programme thermique d’urgence du gouvernement, qui fonctionne au gasoil dans quatre villes du pays : Mbalmayo, Yaoundé, Ebolowa, et Bamenda.  Qu’est qui explique donc les délestages actuels si l’offre dépasse déjà la demande ?

Centrale à gaz de Kribi

Des projets pour relever le défi
C’est avec les privatisations que la Société nationale d’électricité (Sonel) est rachetée par AES, une firme américaine, et devient AES-Sonel, en 2002. La firme américano-camerounaise est alors chargée de la production, du transport, de la distribution et de la commercialisation de l’énergie électrique. Depuis lors, on invoque très souvent là-bas, soit l’étiage due à la saison sèche, soit la faible capacité de réserve en période de crue, ou alors  les pannes du réseau de transport  et de distribution pour justifier ce que RACE, présidé par Paul Gérémie Bikidik, appelle « incompétence », d’un opérateur qui convoque régulièrement des arguments « fantaisistes » pour  « masquer ses défaillances techniques ».
Selon RACE "seuls 2 Camerounais sur 10 ont accès à une électricité de plus en plus chère, alors que le pays possède le 2ème potentiel hydroélectrique d’Afrique après la R.D-Congo". Paul Gérémie Bikidik pense alors qu’il faut stopper le recours systématique au thermique et faire du développement du potentiel hydroélectrique national -estimé à 12 000 MW/an- la priorité des priorités de la politique énergétique du Cameroun.
Les autorités pour leur part, misent sur la réalisation de plusieurs projets parmi lesquels le barrage de Lom Pangar de 73,6 MW en 2014, celui de Mekin en 2015 avec un potentiel de 45 MW et celui de Mem'vele de 200 MW en 2016, pour relever ce défis majeur. Quant à AES-Sonel, elle affiche l’ambition de brancher plus de deux millions de nouvelles familles à l’horizon 2021. Reste que la qualité du service suive.

Marie-Noëlle Guichi